Claude Monet à Venise
1er octobre - 7 décembre 1908
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Saint Georges Majeur au crépuscule Claude MONET 1908 National Museum of Wales, Cardiff, GB |
Les toiles que Monet a peintes lors de son unique voyage à Venise
à l'automne 1908 sont parmi les plus connues et les plus populaires.
Elles sont pourtant en nombre assez réduit : 37 toiles représentant
une dizaine de sujets différents, pris à quelques centaines
de mètres les uns des autres.
"Bien que je sois enthousiasmé de Venise et que j'y aie commencé quelques toiles, je crains bien de ne pouvoir rapporter que des commencements qui seront uniquement des souvenirs pour moi", écrit-il au marchand d'art Gaston Bernheim le 25 octobre. De l'avis même de Monet, le peintre n'a réalisé "que des commencements" à Venise. Bien que les toiles aient été terminées en atelier par la suite, elles n'ont pas l'empâtement d'autres oeuvres qui ont donné au peintre bien des difficultés, comme les Cathédrales de Rouen. Monet ne savait pas en partant s'il aurait envie de peindre à Venise. Peut-être se méfiait-il de ce sujet rebâché par tous les peintres. Pour ne rien décider d'avance, il a préparé un envoi de quelques châssis, au cas où. Et puis, une fois sur place, voilà que Monet est "saisi par Venise". Après plusieurs jours de repérage, il est pris de l'urgence de peindre. |
Dans la suite de vues vénitiennes qu'il réalise, on peut
voir quelque chose du touriste qui veut emporter des images de son voyage.
De fait, il jette son dévolu sur des thèmes consacrés
- le palais des Doges, San Giorgio par exemple - sur la vue depuis son
logement - le palais da Mula - ou sur des scènes typiques comme le
rio de la Salute.
Mais peu à peu, le séjour se transforme en véritable campagne de peinture, comme il en a déjà entrepris de nombreuses. Monet, le peintre de l'eau et des monuments, vit le choc d'une rencontre avec la ville qui confond les deux. Monet a 68 ans quand il découvre Venise. Il est déjà allé en Italie, mais seulement sur la Riviera, à Bordighera. C'est l'invitation d'une amie anglaise, Mary Hunter, qui dispose du palais Barbaro appartenant à Mrs Curtis, sur le Grand Canal, qui le décide à se rendre dans la Sérénissime. Le voyage comble de joie son épouse Alice : habituellement, tous deux ne s'éloignent guère de Giverny, où Monet explore les secrets de son étang aux Nymphéas depuis cinq ans déjà. |
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C'est grâce à Alice que nous connaissons les détails
de ce séjour italien. Tous les jours, elle écrit à sa
fille Germaine Salerou. Cette correspondance quotidienne a été
publiée en 1986 par le petit-fils de Germaine Salerou (Philippe Piguet,
"Monet et Venise", éd. Herscher).
Les Monet arrivent à Venise par le train, le 1er octobre 1908. "C'est trop beau pour être peint ! C'est inrendable !" s'écrie Monet, en admiration. Mais bien sûr, il relève le défi. Dès que son matériel lui est livré et que le temps le permet, le 9 octobre, le voilà à la tâche. Sa journée est réglée par la course du soleil : à 8 heures, il est à San Giorgio Maggiore, face à la place San Marco. A 10 heures, il se rend place San Marco, en face de San Giorgio. Après déjeuner, Monet travaille sur les marches du Palazzo Barbaro. En fin de journée, Monet s'offre un moment de détente, il se promène en gondole avec Alice. Ils admirent le coucher du soleil et sont de retour à 19h. |
Après les avoir accueillis pendant quinze jours, Mary Hunter est
obligée de quitter Venise. Les Monet s'installent alors au Grand
Hôtel Britannia, car Monet a "commencé à peindre des
merveilles" sous les yeux admiratifs de sa femme. Enthousiasmé
par le temps splendide, chaque jour, il met en train de nouvelles toiles.
L'emploi du temps du matin ne change pas, l'après-midi, Monet peint "dans le canal" puis de la fenêtre de sa chambre. "La vue depuis nos fenêtres est merveilleuse, on ne peut rien rêver de plus beau et c'est tout pour Monet", raconte Alice. Les Monet apprécient le confort de l'hôtel et son "éclairage électrique vraiment magique. Monet voit ses toiles, c'est délicieux et vous ferait désirer l'avoir chez soi". Ils feront installer l'électricité à Giverny dès leur retour. |
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Le Palais da Mula Claude MONET 1908 National Gallery of Art, Washington, USA |
Plusieurs jours de mauvais temps font enrager Monet en le condamnant
à l'inaction. Il parle de rentrer et de revenir l'année suivante
; le doute s'installe ; il trouve ses toiles mauvaises. Mais quand le soleil
refait son apparition, Monet retrouve bientôt son ardeur au travail.
Ces variations dans le moral se reproduisent plusieurs fois. Malgré ces interruptions, le travail avance, Alice est "heureuse de voir Monet si plein d'ardeur, et faisant de si belles choses, et, entre nous, autres que les éternels nymphéas". Ce n'est que le froid qui fait renoncer Monet, malgré la fourrure aimablement prêtée par Louis Aston Knight, jeune peintre Américain installé à Rolleboise, près de Giverny, et retrouvé par hasard à l'hôtel. |
Le 3 décembre, Monet peint une dernière esquisse, une gondole.
Le 7 décembre, c'est le retour, après deux mois de séjour
dans la cité vénitienne. Ils ne devaient jamais revenir. La
santé d'Alice se dégrade peu après leur retour. Elle
meurt en 1911.
Monet mettra longtemps avant de finir en atelier les toiles de Venise. En effet, il attend novembre 1910 pour se décider à en retoucher un certain nombre. Mais il laisse en l'état la dernière, la gondole, qu'il offre à son ami Georges Clemenceau. Elle est aujourd'hui conservée au musée des Beaux-Arts de Nantes. 29 toiles sont exposées quatre ans après le voyage, en 1912, à la galerie Bernheim-Jeune à Paris. L'exposition connaît un immense succès. Citons simplement le bel hommage de Paul Signac, plus jeune que Monet de 23 ans : "J'ai eu la joie de voir une grande part de vos oeuvres nouvelles. Et j'ai éprouvé devant vos "Venise", devant l'admirable interprétation de ces motifs que je connais si bien, une émotion aussi complète, aussi forte, que celle que j'ai ressentie, vers 1879, devant vos "Gares", vos "Rues pavoisées", vos "Arbres en fleurs", et qui a décidé de ma carrière... Toujours un Monet m'a ému. Toujours j'y ai puisé un enseignement, et aux jours de découragement et de doute, un Monet était pour moi un ami et un guide. Et ces "Venise", (...) je les admire comme la plus haute manifestation de votre art". |
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© Arlette Cauderlier,
38 route de Giverny 27200 Vernon France,
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Modifié le : Wednesday, 25-Oct-2006 13:42:49 EDT